mardi 10 juin 2008

Du fait d'oser

Eulalie du Midi et son mari élèvent du vin. Un blanc qui vous diabligote le palais en mille et une nuits tant il ouvre d’arrière-chambres capiteuses. Ils vigneronnent leurs élixirs à flancs de coteaux. De chez eux, on contemple la plaine, la moquette à piquette. Eulalie s’étonne. Au Braise-Deal, on fait du carburant à partir d’alcool de canne. Pourquoi ici on n’en produirait pas à partir du raisin, plutôt que de subventionner l’arrachage des ceps ? Tout existe : les distilleries en nombre, le savoir-faire, la ressource humaine… En prime, ça valoriserait les bons crûs. La bibine industrielle exploserait les moteurs, et non plus les foies cirrhotiques. Les mauvais plants : un bon plan ! Eulalie n’est point niaise : elle sait l’omnipotence de la pétrocratie. Mais elle s’ahurit : en pleine crise existe-essence-ciel, comment se puissé-ce que nos élites étiolées somnolent sur le gisement des litres étoilés ? Il suffirait juste d’oser !
P’tit-Conservatoire est viticultrice, elle aussi. Elle a repris le domaine de ses parents, en douzième génération ! Trente hectares d’alchimie. Et un Mourvèdre à fissurer le gosier le plus janséniste. Au sommet d’un paisible pech (ainsi les Tant-occis désignent-ils une colline) une demeure altière se laisse courtiser par la langue sinueuse d’un sentier bordé d’oliviers vieux. L’endroit est superbe. Trop, peut-être. P’tit-Conservatoire se demande si ça n’intimide pas le flâneur de passage. Nous lui avouons que nous avions déjà repéré l’endroit, mais sans nous y aventurer. Et si P’tit-Conservatoire n’était pas venue nous voir en spectacle, nous serions passés à côté d’une belle rencontre et d’un vrai plaisir papillaire… alors qu’il nous suffisait juste d’oser !

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